Les concessions auto en crise !

par | 28 Avr 2022 | Eclairage

Les concessionnaires automobiles sont confrontés à une double crise. Economique d’abord, avec un tassement important des ventes et statutaire ensuite, puisque deux constructeurs majeurs Stellantis et Volkswagen veulent mettre fin à leurs relations.

Un rude combat s’engage autour du premier maillon de la chaine de distribution automobile traditionnellement tenu par des concessionnaires – des acteurs indépendants mais liés par contrat avec les fabricants-. Stellantis et Volkswagen sont en train d’opérer un virage important à la préparation duquel ils n’ont pas associé, semble-t-il, leurs partenaires. Ce qui n’est pas la meilleure façon de les considérer et de préparer l’avenir. Le patron de Stellantis a d’ailleurs résilié, avec un préavis de deux ans, les contrats de tous ses concessionnaires en Europe.

Sous la pression d’un contexte économique difficile, les ventes de voitures neuves sont à la peine depuis le début du Covid et personne n’entrevoit d’amélioration. Mais aussi l’essor des véhicules électriques dont l’entretien s’avère bien moins contraignant que les moteurs à explosion et donc moins consommateurs de temps et d’argent. Bref, le modèle économique des uns et des autres est directement contesté. Déjà, ces dernières années le tiers des concessions a disparu. Il en reste aujourd’hui environ 4 000, elles étaient un peu plus de 6 000 en 2013. Elles emploient encore 160 000 personnes, mais la tendance générale est à la contraction, sinon à la nette réduction des effectifs.

La pression des constructeurs est d’autant plus forte que l’un des objectifs poursuivis est la réduction des coûts de distribution. Les concessionnaires réfutent cet argument et avancent que le coût du réseau est d’un peu plus de 7% en moyenne aujourd’hui, et il est en baisse depuis le début de la décennie (de 7,1% en 2011 à 6,50% en 2019 pour les marques généralistes et de 9,6% à 8,6% pour les marques premium). Il leur semble que le débat serait plutôt du côté de la maîtrise de la relation client autant que celle du réseau. Les concessions seraient-elles moins dociles que les agences de marque ? Ce n’est pas certain, ce qui l’est en revanche est la possibilité pour les constructeurs d’instaurer avec les clients une relation plus directe et d’en capter certains avantages comme la gestion des données. Ce qui vaut de l’or. Sans oublier que les concessions ont une faculté de gestion du prix de vente qui échappe en grande partie aux constructeurs puisqu’ils la gèrent dans une marge globale. Ceci leur permet d’orienter les ventes à coup de rabais. La disparition de cette faculté aurait un effet mécanique sur les prix et le jeu de la concurrence au bénéfice des clients s’en trouverait affecté.

Quoi qu’il en soit, la question clé reste celle de l’accès au client et du maintien de cette relation dans le temps. D’autant que des formes alternatives de distribution s’installent. Internet cherche sa place, Tesla ne vend pas autrement, et des organisations plus larges (type Aramis auto) grapillent des parts de marché. La question de la qualité des services rendus n’émerge que peu du débat focalisé sur les conditions économiques et l’impact des relations surtout s’il y a rupture. Les fonds de commerce ont une valeur certaine. Ces réseaux sont secoués, inquiets et cela pèse sur leur dynamisme. Cela devrait se voir très vite dans les chiffres.

D’autres constructeurs, et non des moindres, Renault ou Toyota, ont décidé de ne pas renverser la table tout en cherchant des améliorations de leurs process pour rationaliser leurs organisations et peser sur les coûts. Dans quelque temps, les chiffres permettront de comprendre qui a eu la meilleure stratégie du big bang ou de la gestion maitrisée du changement.

Henri DEBRUYNE

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