Les chantiers du nouveau boss de l’ACPR
Un haut fonctionnaire, Jean-Paul Faugère, remplacera vraisemblablement Bernard Delas à la tête de l’ACPR, dans quelques jours.
Un changement à la tête de l’Autorité de régulation n’est pas anodin. Cette institution a pour mission de préserver la stabilité financière du secteur de l’assurance et de la banque et de protéger les consommateurs. Autant dire une fonction clé et un rôle essentiel par temps troublés. En effet, des sujets sensibles s’accumulent, d’autres plus anciens doivent retenir l’attention du nouveau vice-président de l’ACPR.
La question de la solvabilité des organismes d’assurance est un sujet de préoccupation. La baisse prolongée des taux et les effets du Covid-19 mettent sous contrainte les fonds propres des assureurs. Et, ce ne sont pas les mesures cosmétiques auxquels certains s’abandonnent, telles que de recourir à la PPE dans le calcul de leurs marges de solvabilité, qui améliorent la situation. Nombre d’entre eux viennent, ces derniers mois de les renforcer de manière significative.
La période récente a donné lieu à une attaque en règle de l’assurance dans laquelle les Pouvoirs publics n’ont pas été les derniers. Beaucoup s’employant à montrer du doigt les réserves financières accumulées par les assureurs et dans lesquelles il fallait piocher. Or, si le régulateur a bien indiqué qu’il n’était pas possible de déstabiliser indument la solidité financière des assureurs ce ne fut guère audible. L’impérieuse nécessité de préserver les équilibres assurantiels n’a guère retenu l’attention. De la part du public, on peut le comprendre, de celle des responsables cela souligne un déficit de culture financière plus préoccupant. Voilà un chantier à ouvrir.
L’activité d’assureurs agissant en France dans le cadre de la LPS est aussi une préoccupation. Les errements récents ont fait des dégâts et des milliers de victimes. Pour l’instant la situation n’a guère évolué, l’ACPR ne contrôle pas ces acteurs. Cette situation est potentiellement dangereuse, en outre elle génère des distorsions de concurrence. Les déconfitures de ces opérateurs ont montré qu’ils semblaient pratiquer du dumping sous différentes formes. Ce qui leur a été fatal, mais aussi préjudiciable au marché.
Le contrôle des pratiques commerciales est opéré, mais les sanctions restent faibles. Tout au moins en comparaison de celles infligées par l’AMF, dans des domaines voisins même s’ils ne sont pas comparables. Or, les sanctions doivent être dissuasives si nous voulons que la règle soit respectée.
Lors de l’audition par les parlementaires du successeur probable de Bernard Delas, il a été beaucoup question d’indépendance. En effet, Jean-Paul Faugère est l’actuel président de CNP assurances et donc particulièrement impliqué dans le groupe désormais constitué avec la Banque postale et la Caisse des dépôts dont l’actionnariat est principalement public. Un conglomérat qui pèse lourd dans l’univers financier français. Il lui faudra donc autant de rigueur que de vertu pour que l’ombre des conflits d’intérêts ne vienne planer sur son magistère.
Les qualités de l’homme ne sont mises en doute par personne et ses compétences sont reconnues en particulier dans le domaine financier. Son CV est impressionnant, néanmoins, les acteurs du secteur attendent avant tout de la détermination.
Henri DEBRUYNE