
Un pavé dans la mare pour redonner du pouvoir d’achat et dynamiser l’économie française
116 milliards d’€ de pouvoir d’achat ! C’est la cible du projet présenté par l’U2P1 pour que « le travail paye plus ». Au-delà de l’enjeu louable de redonner des moyens financiers « aux travailleurs », le défi est de ( re )dynamiser une partie du tissu économique et lui donner des capacités de maîtrise et d’action.
Depuis 40 ans le poids des prélèvements sociaux n’a cessé de s’alourdir au point que la rémunération conservée n’est plus que de 54% aujourd’hui, alors qu’elle était de 69% en 1970. De fait, la majeure partie du coût de la protection sociale est supportée par les salaires. La mesure phare de l’U2P consiste à supprimer la CSG-CRDS (9,7%) sur tous les revenus d’activité. Il s’agit, en réalité, de transférer cette charge et de la faire supporter par d’autres. Les propositions d’ailleurs fleurissent pour répartir différemment le poids du « modèle social français » dont personne ne semble contester qu’il doive continuer à garantir un haut niveau de couverture.
En formulant son projet, l’U2P, propose d’améliorer le niveau de vie des « travailleurs » ce qui est en soi une proposition révolutionnaire dans la mesure où elle conduit à repenser les différentes contributions à la protection sociale, ce qui n’a jamais été fait depuis 1945. En filigrane, se pose la question de la supportabilité des dépenses sociales. Question taboue, s’il en est, que seuls quelques économistes2 osent aborder en soulignant que l’immobilisme actuel n’est plus tenable au regard de la situation des comptes de la Sécurité sociale installés durablement dans le rouge.
Redonner du pouvoir d’achat contribue à redynamiser deux des leviers de l’économie française. Le premier est d’alimenter la consommation. En France, elle représente 55% du PIB. Elle a donc un effet majeur sur l’emploi et le niveau de vie des actifs. Le second levier, est de favoriser la créativité et l’innovation en facilitant l’accès à des biens et services à plus forte valeur ajoutée. Chaque citoyen a ainsi le moyen de mieux maîtriser sa vie et d’assumer ses choix. Ce qui dans une société évoluée est une garantie de vitalité tant sociale qu’économique. En effet, entre l’impossibilité d’augmenter les prélèvements obligatoires (45.6% du PIB) et la nécessite de donner à chaque citoyen de réelles marges de manœuvre il faut trouver de nouvelles voies. Une nouvelle répartition de la charge, comme proposée par l’U2P, est indispensable, la situation actuelle conduit progressivement à une certaine forme d’asphyxie pour ne pas dire de paupérisation.
Une telle analyse suggère, sans ambiguïté, que cette révolution ne pourra se faire que par l’enrichissement collectif, c’est-à-dire l’augmentation du PIB par habitant en créant de la valeur. Cela induit un débat plus large auquel les entreprises ont un intérêt supérieur. En effet, elles ont besoin de clients solvables. Les assureurs y sont plus sensibles encore. Il leur faut un nombre croissant d’assurés capables de financer l’assurance de leurs biens et de se constituer une épargne suffisante pour conforter leur situation financière future.
1 U2P- l’union des entreprises de proximité est une organisation patronale qui représente les petites entreprises et les travailleurs indépendants. Elle est présidée par Michel Picon.
2 Olivier Blanchard ancien chef économiste du HMI
Henri DEBRUYNE