Le dilemme des pouvoirs publics : Contraindre ou soutenir la liberté économique des assureurs ?

par | 21 Oct 2021 | Eclairage

En présentant les chiffres du marché français de l’assurance, l’ACPR s’est inquiétée de la dégradation des résultats. Au même moment, le ministre Véran engage un bras de fer avec les complémentaires santé sur les tarifs pour 2021.

L’assurance française a résisté à la crise. Le ratio de solvabilité moyen, de 242%, affiché à fin 2020 s’est « stabilisé à la hausse au cours du premier semestre 2021 », selon l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) lors de la présentation des chiffres du marché français 2020. Néanmoins, « la faible rentabilité » des assureurs « dans un contexte de taux bas persistants, reste préoccupante », a martelé son secrétaire général Dominique Laboureix.

Il faut lire ce rapport de l’ACPR comme une véritable alarme. D’une part, l’institution constate et alerte sur la dégradation des résultats, et, d’autre part rappelle une évidence. Pour affronter le renforcement des risques actuels et ceux qui se profilent, il faut de l’argent, beaucoup d’argent, pour investir, mais également pour conforter la solvabilité des entreprises d’assurances. L’insuffisance de moyens bride toute démarche de progrès.

Le marché français de l’assurance est en Europe l’un de ceux où la concurrence est la plus forte. Ce qui a pesé sur les prix et stimulé les offres pour le meilleur bénéfice des assurés. Pour autant, la société française et ses dirigeants n’ont de cesse que de vouloir encadrer, orienter, voire peser exagérément sur ses mécanismes économiques. La complémentaire santé en est un exemple jusqu’à la caricature. Les assureurs ont une position modeste dans la globalité de la prise en charge des soins, autour de 13%. Pour autant, ils sont soumis à un encadrement particulièrement étroit et qui n’a eu de cesse que de se renforcer au fil du temps. Aujourd’hui, les OCAM1 sont dans un corner. Après leur avoir systématiquement brider les ailes, il leur est reproché d’être chers, peu efficients et pour tout dire sans réelle valeur ajoutée. Par voie de conséquence, ils sont voués à disparaitre dans un ensemble étatisé. CQFD. Alors, c’est vrai le débat ne portera plus sur le niveau des augmentations des cotisations, mais sur celui de la dette de sécurité sociale !

Or, la liberté économique est un des facteurs clés de la compétitivité. Sur ce point, la France est particulièrement mal placée (64ème sur 180 pays selon de Forum de Davos) ce qui constitue un handicap majeur pour développer des activités rentables et pour les assureurs d’aiguiser leurs capacités à se saisir des nouveaux risques. Il est totalement illusoire de se satisfaire d’un ratio de solvabilité moyen satisfaisant qui d’ailleurs ne reflète pas la situation individuelle de chaque assureur – l’amplitude est de fait importante – si les opérateurs sont bridés.

L’observation de l’ACPR est frappée du simple bon sens économique. Les assureurs doivent augmenter leur rentabilité pour assumer ce pourquoi ils sont faits. Mais ce raisonnement est insuffisant, ils doivent bénéficier d’une liberté suffisante pour agir, tester et innover. Ce qui ne veut pas dire faire n’importe quoi, le superviseur est là pour y veiller !

1 OCAM Organismes complémentaires d’assurance maladie

Henri DEBRUYNE

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