La Médiation de l’assurance : le choc des saisines !
Le rapport du Médiateur de l’assurance pour 2023 est un miroir des insatisfactions des clients, les assureurs seraient bien inspirés d’agir.
Au-delà de l’augmentation importante du nombre de réclamations (+42% par rapport à 2022), en soi révélatrice, ce sont bien des insuffisances et des dysfonctionnements qui sont révélés. Certes, la réforme du traitement des réclamations1 explique en partie cette hausse, mais pas seulement. Manifestement certains assureurs ne se sont pas dotés des procédures de gestion suffisamment diligentes pour traiter les réclamations de leurs clients. Certains donnent en effet l’impression de trainer les pieds. Résultat, trop de dossiers, environ 30%, remontent vers la Médiation de l’assurance alors qu’ils auraient dû être traités plus tôt par les services ad hoc des assureurs. Nous pouvons imaginer sans peine l’effet désastreux sur la relation avec les clients concernés et ce que ces derniers peuvent en dire autour d’eux.
De fait, ce n’est pas le job de la Médiation de gérer les réclamations que les procédures des assureurs devraient normalement absorber. Ce n’est d’ailleurs pas qu’une question d’organisation. En effet, de nombreuses saisines mettent en lumière des rédactions de contrats peu claires ou ambiguës, ce qui suscite beaucoup d’incompréhensions et donc de contestations. C’est particulièrement vrai des clauses d’exclusions qui doivent être précises, formelles et limitées. La Cour de de Cassation s’est déjà exprimée et à plusieurs reprises sur ce sujet. Néanmoins, le Médiateur constate la persistance de clauses illégales. Ce qui est injustifiable. Enfin, les délais d’indemnisation des sinistres et les procédures d’expertises semblent soulever de plus en plus de difficultés.
Finalement, cette question des réclamations est un sujet de politique générale de l’entreprise pour ne pas dire de direction générale. Il y va de l’image de celle-ci et de sa crédibilité. Le rapport souligne d’ailleurs un sentiment de défiance persistant chez beaucoup d’assurés vis-à-vis de leur assureur et ou de l’expert qui intervient dans l’évaluation de leur sinistre. C’est quand même problématique dans un métier fondé sur la confiance. Il ne sert à rien de distiller une information rassurante sur la qualité des prestations qui seront délivrées si elle est démentie par les faits. Il y a là un vrai caillou dans la chaussure des assureurs. Heureusement, l’immense majorité d’entre eux a mis en place des procédures efficaces et s’attache à ce que ses clients restent satisfaits. Comme souvent le nombre réduit de ceux qui sont insatisfaits gâche la perception d’ensemble. Le rapport pour 2023 en témoigne.
Le Médiateur de l’assurance identifie trois axes d’amélioration. Le premier concerne les assureurs affinitaires qui doivent veiller à ce que leurs produits aient bien une utilité pour leurs assurés. Dans le cadre du devoir de conseil à la souscription, ils doivent attirer l’attention des assurés sur le caractère limité de leurs garanties, si tel est le cas. Ensuite, il montre du doigt les clauses d’exclusion illégales, particulièrement les rédactions vagues telles « le défaut d’entretien », « la négligence », « et autre mal de dos ». Elles doivent disparaître des contrats d’assurance. Un chantier en soi, car il faut procéder à une révision générale, mais qui s’avère indispensable.
Enfin, l’encadrement des procédures d’expertise (transparence, indépendance, délais, déontologie…) et d’indemnisation (temps de gestion du sinistre, de prise de décision puis de paiement) apparait vraiment nécessaire. Dans trop de situations, le sentiment ressenti par les clients est celui de l’arbitraire.
1 Recommandation du CCSF et entérinée par l’ACPR
Henri DEBRUYNE