Escompte et précompte de commissions : le dossier empoisonné !
Cela s’appelle jouer avec le feu. Laisser perdurer des pratiques de rémunération considérées comme illégales et ne pas se mettre d’accord pour les faire disparaitre ou les encadrer jette un discrédit sur le système actuel des commissions.
France Assureurs, le CTIP et la Mutualité Française cherchent à se mettre d’accord sur ces pratiques de rémunération controversées que sont l’escompte et le précompte de commissions. Certains, comme le MEDI, les considèrent comme incompatibles avec le Code des assurances. D’autres tentent de soutenir une lecture plus arrangeante de la réglementation pour faire perdurer ces pratiques. Quoi qu’il en soit, c’est un effort louable des Organismes d’assurance de rechercher à rendre ces dispositifs, a minima, compatibles avec les intérêts des assurés. Naturellement, la loi, en l’occurrence le Code des assurances, en constitue le bornage.
La démarche de principe est contrecarrée par Planète CSCA1, qui a découvert ce projet fortuitement sans avoir été convié à en débattre alors qu’ils sont directement intéressés. Le président de Surmont a ainsi précisé que son syndicat ne ratifierait pas ce projet de protocole. Position ferme justifiée par le fait que seuls les intermédiaires seraient concernés par ses dispositions. Les réseaux salariés seraient, en effet, exclus de ces modalités d’encadrement du précompte. A noter, par ailleurs que certains réseaux d’agents généraux pratiquent le précompte et ne semblent pas davantage conviés. Sans oublier que ces derniers, comme beaucoup de courtiers, utilisent les services de collaborateurs commerciaux salariés ou non-salariés (MIA) potentiellement concernés par ces dispositifs de rémunération. C’est un retour en arrière de plus de 20 ans, lorsque la DIA2 imposait des règles qui ne s’appliquaient qu’aux seuls intermédiaires. Une part importante des distributeurs n’était pas concernée par les mêmes obligations.
Bref, un projet bien intentionné pour tenter de sortir de ces pratiques, mais que le manque d’ambition vide de son efficacité. De fait, tous les acteurs de la distribution sont concernés ou aucun, surtout sur un sujet aussi sensible que controversé. Cette position est dangereuse. Elle crée une situation juridique pour le moins périlleuse. Elle renforce les arguments des contempteurs du mode de rémunération à la commission qui ne se lassent pas de vouloir le mettre à bas. Contrairement à ce que beaucoup pensent, ce débat très vif dans la RIS3 n’est pas clos. Le Parlement européen est revenu sur cet aspect du projet de la Commission européenne qui voulait quasiment supprimer le commissionnement. Mais il doit encore être validé par le Conseil. Manifestement ce n’est pas encore acquis.
Rien ne dit, non plus, que les Autorités françaises ne vont pas s’emparer de cette question et légiférer. Ce dossier est empoisonné. Les arguments pour justifier ces pratiques ne sont pas soutenables devant une opinion publique prompte à s’insurger sur des modalités qu’elle ne comprend pas, qu’elle juge, à tort ou à raison, obscures et aboutissant à des frais exorbitants. Ne doutons pas un instant que le Parlement soit à l’unisson.
1 Planète CSCA est le syndicat des courtiers en assurance.
2 Directive sur l’Intermédiation en Assurance (2002)
3 Retail Investment strategy
Henri DEBRUYNE