Démarchage téléphonique : la médiocre polémique
L’ACPR attire l’attention des assureurs et des courtiers sur le démarchage téléphonique à partir de pays hors de l’Espace économique européen (EEE). Une mise en garde perçue comme un excès de pouvoir voire contra-legem1.
Quel mauvais procès ! La pollution que représente le démarchage téléphonique, tous secteurs confondus, est une réalité guère contestable. Les multiples dispositions, y compris législatives, prises pour le discipliner, faute de le rendre acceptable, n’y ont rien changé. En matière d’assurance, l’ACPR a régulièrement alerté sur ces pratiques « inadéquates », sans plus de succès. Il faut dire qu’elle a enquêté, menacé, mais peu sévi. Alors qu’elle resserre sa doctrine, elle soulève la contestation de ceux, peu nombreux, qui prospèrent sur ces pratiques. Notons qu’elle le fait après avoir, à nouveau, lors de ses contrôles, relevé « des manquements significatifs à la réglementation, qui génèrent de nombreuses réclamations… ». Bref, ces pratiques sont montrées du doigt, ce qui n’étonne plus grand monde.
N’y-a-t-il pas des causes plus vertueuses à soutenir ? Car, en réalité comme l’a montré le colloque organisé par l’Argus lors des journées du courtage 2025, les professionnels sont conscients des dérives de cette pratique commerciale et en reconnaissent les effets délétères. L’industrialisation du démarchage téléphonique a conduit à une dégradation des pratiques commerciales opérées par ce moyen ainsi que des résultats obtenus. C’est vrai des pratiques observées, mais aussi de la qualité des portefeuilles ainsi constitués.
Quoi qu’il en soit, le 11 aout 2026, le dispositif d’encadrement se resserrera une nouvelle fois. L’interdiction sera formelle et ne souffrira que d’exceptions très encadrées. Néanmoins, la position du Régulateur est fustigée. A tort ou à raison sur le plan du droit, laissons les juristes en débattre. Observons, néanmoins, que personne ne se grandit à défendre des pratiques qui vont à l’encontre du respect des intérêts des consommateurs. L’honneur du métier est justement d’y attacher un soin jaloux. Ce qui est le comportement de l’immense majorité des distributeurs. Lesquels pâtissent, d’ailleurs, de la mauvaise publicité de ces méthodes dont 97 % des Français disent qu’elles les agacent.
Certes, le modèle économique sur lequel certains acteurs ont appuyé leur développement commercial se trouve remis durement en cause. Pour autant, est-ce que cela justifie des pratiques a minima très en dessous de la norme réglementaire ? Et, ne faudrait-il pas mieux anticiper les conséquences des choix opérés ? Bien sûr, le durcissement de la réglementation a pu en surprendre plus d’un. Mais au fond s’étaient-ils posés la question de savoir si l’intérêt du client serait bien servi ?
Enfin, l’ACPR, qui manifeste une fermeté bienvenue, prendra-t-elle le taureau par les cornes pour la faire respecter ?
1 L’Argus de l’assurance du 9 octobre 2025
Henri DEBRUYNE