Agences bancaires : un maillage territorial en question

par | 17 Avr 2025 | Eclairage

Deux importants réseaux d’agences bancaires viennent d’annoncer une réduction de leurs implantations (BNP et CA). En réalité, toutes les banques sont engagées dans un effort de rationalisation.

Sans être un phénomène nouveau, le nombre d’agences bancaires est en réduction nette depuis une dizaine d’années. Trois raisons principales conduisent à cette évolution. La digitalisation des activités, a notamment permis le développement des banques à distance. Elles concurrencent directement les agences physiques. Ensuite, le coût élevé de ces dernières qui pèse sur la profitabilité des banques comme l’a fait observer la Cour des comptes. Enfin, les changements d’habitudes des clients qui désertent les agences tout en exigeant des services plus élaborés.

Néanmoins, les agences physiques conservent des atouts. Elles fidélisent les clientèles. La fermeture d’une agence se traduit par une perte de la moitié de son portefeuille de clients. Elles restent indispensables à ceux qui sont éloignés des pratiques digitalisées voire n’ont tout simplement pas accès à Internet. Enfin, l’observation des flux d’affaires montre que les agences drainent l’essentiel des apports et particulièrement les plus rentables. Elles restent importantes pour certains clients, notamment ceux qui préfèrent un contact humain pour des conseils financiers ou des opérations complexes.

La « stratégie des drapeaux » a conduit à un maillage exceptionnel puisque la densité des agences bancaires est en France le double de la moyenne européenne. Il faut que le reflux se fasse en bon ordre, mais sans lambiner car les banques françaises ont un besoin vital de redresser la rentabilité de leurs réseaux de distribution. Elles sont donc à la recherche de l’équilibre entre la digitalisation de leurs services et le maintien d’un réseau d’agences pour répondre aux exigences croissantes de leur clientèle.

Des tendances se dessinent depuis plusieurs années. La digitalisation, bien installée, va encore progresser. Elle répond à une demande de maîtrise de la gestion des comptes et de facilités qui ne peuvent que croître. Les outils sont de plus en plus sophistiqués pour être pratiques et surtout fluides et sécurisés. Sachant que les plateformes numériques, qui soutiennent tout cela, mobilisent des budgets conséquents. D’où la question, en forme de quadrature du cercle, de faire cohabiter deux systèmes d’accès aux services bancaires ce qui ajoute des coûts aux coûts.

Pour autant, les agences jouent un rôle crucial, notamment pour les opérations à forts enjeux commerciaux et pour les conseils personnalisés, la gestion de portefeuilles d’investissement ou le traitement de demandes de crédit. Elles peuvent également être un lieu de confiance pour les clients qui ont besoin d’aide pour des questions financières. Pour capitaliser sur cette veine, les banques adaptent leurs services en agence afin de conserver leurs clients et d’en attirer d’autres. Cela inclut des horaires d’ouverture élargis, des conseillers spécialisés pour certains produits, et des événements ou ateliers pour aider les clients à mieux comprendre leurs finances. Certaines banques (BNP, LCL) s’orientent vers une différenciation des services. Le conseiller dédié est réservé à ces opérations à plus forte valeur ajoutée moyennant une tarification adaptée et donc plus élevée.

Cela suffira-t-il à améliorer la situation des réseaux bancaires ? Dans tous les cas, la marche est haute. Le passage d’un modèle d’affaires à un autre est toujours périlleux. Il s’avère complexe car il remet en question des modes de fonctionnement forgés par les comportements. C’est donc bien un changement profond qui est à l’œuvre. Il concerne, bien sûr les outils, mais plus encore les collaborateurs et les clients. La compétition qui a conduit à cette remise en cause, va continuer à produire ses effets, parfois bénéfiques, parfois douloureux, mais aussi pour le plus grand bonheur des concurrents.

Henri DEBRUYNE

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