Rémunérations, commissions, honoraires, Qui rétribue quoi ?
Le débat sur les commissions, relancé par la commissaire européenne aux finances Mairead McGuiness, devient de plus en plus confus. Le rejet brutal des commissions empêche toute approche différenciée.
Sans nuance, Mairead McGuiness a allumé le feu en proclamant, avec d’autres, le mécanisme de rétribution fondé sur des commissions, onéreux et non conforme aux intérêts des clients. Les professionnels qui utilisent principalement cette forme de rémunération sont furieux et cherchent à en défendre le principe en utilisant des arguments le plus souvent robustes, mais aussi parfois plus spécieux. Certes, nous parlons ici de rémunération, un sujet légitimement sensible et l’on oublie, en fait, les réalités qu’elle recouvre.
L’activité d’un « distributeur d’assurance » se décompose schématiquement en trois parties. La recherche de prospects pour les intéresser aux produits ou services qui pourraient leur être proposés. Le conseil, désormais parfaitement encadré par la réglementation et, enfin, les actes de gestion associés, le plus souvent administratifs. Certes, ils forment un tout, mais avec des destinations différentes.
Rechercher des prospects pour en faire des clients est vital pour un distributeur, il s’agit d’un investissement que son talent et son travail rentabiliseront. Comme pour toute activité économique, il doit donc le préfinancer en l’intégrant dans son business plan. Le conseil est une prestation à part entière. Il est délivré à une personne et doit être rendu pendant toute la durée du contrat. Pour chaque distributeur et plus encore pour un intermédiaire il s’agit de sa fonction essentielle. Celle par laquelle il exprime sa raison d’être, la noblesse de son métier. S’il est courtier, elle est renforcée par le fait qu’il reçoit de son client le mandat d’agir pour son compte. Enfin, tout distributeur d’assurance effectue diverses tâches de gestion pour le compte de l’assureur par lequel le risque est porté.
Le système doit donc rémunérer deux activités : le conseil et les actes de gestion pour compte. Son volume global de recettes doit également permettre au courtier de financer son développement. Cette vision, un tant soit peu théorique, n’est pas inutile. Elle permet de normer les actes, d’évaluer leurs coûts et de faire des comparaisons, toujours très instructives, entre les différents modes de distribution. Rien n’est inutile dans une clarification. C’est une vision réductrice comparable à l’éventuelle interdiction des commissions qui a conduit les régulateurs, dans le cadre de MIFID, à interdire aux banques de fournir des recherches gratuites aux clients en contrepartie de commissions de trading. Celles-ci pouvant être considérées comme une incitation et ainsi créer un conflit d’intérêts pour les investisseurs. Il s’en est suivi un appauvrissement de la connaissance préjudiciable aux intérêts des clients. Aujourd’hui, les mêmes ou leurs successeurs recherchent un moyen de reconstruire ce qui fonctionnait bien et a très largement disparu.
Certes, le commissionnement sans ventilation masque ces réalités. Mais il n’y aura guère de progrès si le débat ne prend pas en compte ces réalités. C’est en partie le sens des politiques de rémunérations dont l’objectif premier est de prévenir les conflits d’intérêts, mais qui à l’évidence devraient clarifier voire rendre transparente la manière dont les différents actes sont rémunérés. Si d’aventure nous allons vers une transparence accrue, l’identification des coûts deviendra indispensable pour offrir aux clients des informations indiscutablement comparables.
Henri DEBRUYNE