Et si nous parlions d’avenir ?
Les activités d’assurance et d’épargne sont en train de vivre une mutation sans précédent. La réglementation, le digital et l’évolution des modes de consommation se conjuguent pour imposer de nouvelles approches et pratiques différentes.
Trois mouvements convergent pour remettre en question les pratiques, les modes de fonctionnement et les modèles économiques des systèmes de distribution. Tous les trois sont inéluctables et ont déjà commencé à faire sentir leurs effets. Seules l’amplitude et la rapidité des évolutions des modes de consommation ainsi que la diffusion du digital, sont difficiles à apprécier. L’évolution réglementaire est installée, ses contraintes connues, mais si beaucoup les ont vécues comme des contraintes, peu ont cherché à en faire des atouts et des leviers de performance.
Pourtant, les mouvements sont déjà bien réels. Les intermédiaires, malgré les pessimistes font mieux que résister et vivent pour beaucoup les prémisses d’un renouveau. Les bancassureurs tracent leur sillon et n’ont pas conduit leurs concurrents vers leur tombe. Quant aux assurtechs, véritables souffles de fraicheur et d’innovation, elles montrent d’autres voies, des méthodes nouvelles, sans avoir pour l’instant renversé la table. Manifestement, rien n’est acquis, rien n’est écrit et le champ des possibles reste large.
Au-delà des incertitudes, nous sommes face à une occasion rare de repenser et peut-être de réinventer les métiers de la distribution. En d’autres termes, de légitimer leur valeur ajoutée auprès des clients. C’est à la fois indispensable, voire vital, mais aussi exaltant. En effet, il est possible de se borner à une mise en conformité des processus sans autre ambition, de moderniser pour éviter de prendre trop de retard. Ou de prendre le parti de rechercher le lien entre ces obligations et les attentes des clients, qui, quoique l’on dise, ne sont pas si éloignées. L’histoire de l’assurance souligne combien l’arrivée des grands mouvements concurrentiels, les MSI dans les années 70, ou les réseaux bancaires vingt ans plus tard, a été grandement facilitée par la cécité des tenants du marché de l’époque. Ces derniers n’ont en effet pas vu – pas voulu voir – ou ont dénié l’importance des mouvements à l’œuvre. La suite nous la connaissons. Ces nouveaux compétiteurs ont pris les 2/3 de la collecte d’assurance vie et la moitié de l’assurance non-vie !
Aujourd’hui, le marché est confronté à l’un des mouvements les plus importants et des plus déstructurants pour les distributeurs comme pour les compagnies. Mais ces mouvements sont aussi une source rare d’opportunités et donc d’occasions de repositionner les offres et les prestations auprès des clients. Bref, de préparer l’avenir. Mais à l’évidence, ce n’est pas le plus répandu. Les Pouvoirs publics et le régulateur sont affairés à produire de la réglementation, tandis que les acteurs sont assez partagés. Les uns, que ce soient les compagnies ou les distributeurs, oscillent entre un attentisme résigné et l’inquiétude de savoir concrètement comment gérer ces vagues de contraintes. Les autres, sont déjà engagés dans les voies du futur, ils dépassent les pesanteurs du moment, souvent en prenant des risques à bon escient, mais ils sont déjà l’assurance de demain.
Cela a encore la forme d’un patchwork fait d’expérimentations, de tâtonnements, d’avancées et de reculs. Bien sûr, la révolution digitale est convoquée, l’orientation client invoquée, de plus en plus à un niveau qui éclaire vraiment ce qu’il faut anticiper et les adaptations nécessaires. Bref, le mouvement est lancé et d’ici peu les écarts entre les uns et les autres deviendront vraiment perceptibles. Il est vraisemblable que les leaders de demain soient en train progressivement de se dégager.
Henri DEBRUYNE