La baisse des taux met à l’épreuve la solvabilité des assureurs

par | Oct 17, 2019 | Eclairage

Les taux bas pèsent sur la solvabilité des assureurs. Jusque-là, cette perspective restait une hypothèse, elle prend de la consistance car cette baisse des taux devient structurelle. Certains assureurs sont contraints de prendre des mesures.

En assurance non-vie, la fonte des produits financiers impose une rigueur accrue à la souscription des risques. En effet, ces produits financiers ont longtemps servi à améliorer les ratios combinés lorsque c’était nécessaire ou bien à doper le résultat. Cet amortisseur disparait et met en première ligne la qualité des politiques de souscription qui ne peut plus s’écarter des tarifs techniques. Une rigueur accrue s’impose et le juste prix devient une vertu cardinale. D’autant que, la baisse des taux pèse sur le provisionnement des sinistres en particulier ceux des branches longues. Ce qui a pour effet d’en augmenter le coût avec un effet quasi mécanique sur les tarifs.

En assurance vie, la situation est rendue plus délicate encore. La baisse des taux entraine tendanciellement un impact sur les ratios de solvabilité. Ce n’est pas complétement nouveau, la faiblesse des taux d’intérêts complique depuis quelque temps le pilotage des contrats libellés en euros. L’arbitrage n’était jamais facile entre le niveau du rendement servi aux assurés et le maintien à bon étiage des ratios de solvabilité, favoriser l’un n’étant pas sans incidence sur l’autre. Mais ces jeux d’équilibre ne suffisent plus lorsque les taux d’intérêt à plus de 10 ans tangentent le zéro, voire passent en négatif.

Désormais, cette catégorie de contrats à taux garantis est sur la sellette. L’idée de leur substituer des supports en UC est séduisante, car ces derniers sont moins gourmands en fonds propres. Mais elle ne sera pas à effet immédiat, elle prendra beaucoup de temps. En effet, changer de modèle est une lourde tâche dont les effets ne seront réels que dans une dizaine d’années. Il faut du temps, beaucoup de temps pour réussir une mutation de cette ampleur. Aujourd’hui, les fonds en euros constituent les 2/3 de la collecte de l’assurance vie. Une proportion qui doit impérativement baisser. Il va falloir convaincre les clients de passer de contrats qu’ils jugent sûrs à des formules en UC qui par construction et nous le voyons par nécessité sont assorties d’un partage de risque. La réussite d’un pareil changement ne sera pas perceptible avant longtemps.

Pendant ce temps, les tensions sur les marges de solvabilité vont s’accroitre. Le maintien des ratios à des niveaux suffisants devient un exercice délicat. D’ailleurs, deux compagnies d’assurance viennent, ces dernières semaines, de renforcer leurs fonds propres de manière significative. La première est restée discrète, la seconde est Suravenir filiale du groupe Arkéa qui a renforcé les fonds propres de sa fille de 540 millions d’euros.

Les ratios de solvabilité, déjà sous l’œil de l’ACPR vont désormais être scrutés par le marché avec une intensité accrue. Cet indicateur qui allait de soi, et que l’on regardait distraitement, est désormais déterminant dans l’appréciation de la solidité des entreprises d’assurance et de la qualité de leur gestion.

Henri DEBRUYNE

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