Cession d’AVIVA, une équation humaine

par | 29 Oct 2020 | Eclairage

La cession éventuelle d’AVIVA France agite le « landerneau » professionnel, jusqu’au monde politique. Au-delà du combat qui s’annonce entre les éventuels repreneurs, cette opération soulève de redoutables questions sur la valorisation de l’acquisition.

AVIVA est un groupe important, mais peu cohérent. Une compagnie d’assurance, un réseau d’intermédiaires, une banque et une association d’épargnants. Difficile de faire plus atypique. Résultat les repreneurs évaluent, soupèsent et à l’évidence échafaudent ce qu’ils conserveraient et ce qu’ils recèderaient. D’ailleurs, il suffit de regarder le profil des entreprises qui montrent de l’intérêt pour pressentir le prisme de leurs intentions.

De fait, cette faible cohérence entre les composantes du groupe a pesé sur ses performances et, selon tout vraisemblance, conduit à sa cession. Le démantèlement, sauf énorme surprise, est donc dans toutes les têtes sinon au cœur des projets de reprise. Néanmoins, les composantes d’AVIVA ont chacune des atouts, une identité et des positions sur le marché qui sont loin d’être négligeables.

C’est là que se retrouve la question centrale. Avec qui chacune des entités peut-elle continuer sa vie de manière harmonieuse et performante pour ses clients comme pour ceux qui collaborent avec elle quels que soient leurs statuts ? Le débat ne peut pas se réduire aux seules équations financières. La performance résulte aussi de la bonne conjugaison des éléments immatériels que sont l’adéquation aux marchés, la cohérence du projet, l’affectio societatis.

L’histoire des fusions, absorptions, rapprochements démontre à l’envie que ces opérations ont souvent été plus destructrices de valeur qu’elles ne se sont traduites par une réelle bonification des actifs y compris humains. L’AFER ne se laissera pas embarquer dans un projet qui contrarierait sa raison d’être, l’UFF a déjà sa vie propre du fait qu’elle est une banque. Quant au cœur des compagnies qui travaillent notamment avec des intermédiaires, elles ont forcément forgé une culture et des pratiques qui font ce qu’elles sont. Comment imaginer un instant que les agents généraux, ces indépendants qui ont lié leur destin professionnel dans un cadre bien précis, se laisseront balloter dans un nouveau dispositif dans lequel ils ne se retrouveront pas ?

Les marques d’intérêts, quatre à ce jour, ne doivent pas faire l’impasse sur ces éléments qui sont le cœur de la réalité. Dans tous les cas, c’est le retour d’expérience des nombreuses opérations menées ces dernières années qui nous l’enseigne. Car in fine la sanction est économique et en cette matière un +un n’ont jamais fait deux ! L’enjeu est clairement d’atteindre un retour sur investissement convenable et donc d’éviter que ceux qui construisent le résultat ne tournent le dos ou votent avec leurs pieds.
Quant aux « cibles », la victimisation n’est pas de mise, elles ont intérêt à être pro actives pour expliquer ce qu’elles sont, leurs atouts et exiger de retrouver un mode de fonctionnement propice à leur développement. Elles doivent éviter de s’accrocher à un passé, le plus souvent idéalisé, mais qui n’est plus.

Henri DEBRUYNE

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