Les insuffisances de la régulation financière – L’ombre des subprimes plane encore

par | 8 Avr 2021 | Humeur

Wirecard, Greensill et Archegos, trois faillites qui secouent la planète financière, ravivent les souvenirs des subprimes et pointent du doigt les défaillances de la régulation.

Deux starts up de la finance et un hedge fund viennent de faire la démonstration que les mesures adoptées depuis la crise provoquée par les subprimes sont insuffisantes ou mal appliquées. L’argent (trop) abondant, des prises de risque non maîtrisées ou inconséquentes, des contrôles insuffisants et nous retrouvons les ingrédients qui ont conduit à la crise de 2007. A croire que nous n’avons rien appris. Ce qui n’est pas le cas, car les mesures prises ont renforcé la capacité de résistance des banques et les effets systémiques sont moins à craindre. Il n’empêche que les régulateurs allemand, britannique, français et suisse n’ont rien vu ou trop tardivement. Ce n’est donc pas une défaillance partielle ou localisée qui est en cause, mais plus sûrement des processus insuffisants et, au premier rang, un défaut de transparence.

Certes, les experts nous expliquent que ces trois situations n’ont pas les mêmes causes. Il n’en demeure pas moins qu’a priori ceux qui auraient dû intervenir à temps, ne l’ont pas fait ou beaucoup trop tard. Ni dans les contrôles internes, ni à l’évidence externes, commissaires aux comptes et régulateurs. S’agissant de Wirecard, l’affaire est désormais du ressort politique et fait grand bruit en Allemagne. Archegos, le hedge fund américain, secoue le monde helvétique, en effet le Crédit Suisse, particulièrement concerné, évalue l’impact de cette déconfiture dans ses comptes à 4 milliards d’euros. Auxquels les analystes ajoutent 1,8 milliards d’euros au titre des déboires de Greensill. Pour l’instant, ni Deutsche Bank, ni BNP n’ont évoqué leurs engagements. Cela commence à faire beaucoup d’argent.

L’insuffisance des contrôles n’explique pas tout. Bien sûr, ils auraient dû déceler, mais clairement les investisseurs ont été dupés à un moment ou à un autre. Wirecard, spécialiste des paiements, bénéficiait d’un vent porteur soutenu qui alimentait une croissance exceptionnelle. Greensill, fintech dans l’affacturage, a bénéficié de l’effet de mode des new tech au moment où les banques réduisaient leurs engagements dans cette activité. Bref, ces acteurs ont profité de la crédulité ou de l’aveuglement de ceux qui auraient dû être suspicieux en exigeant plus de transparence. D’ailleurs, la presse spécialisée avait fait son travail en soulevant des interrogations et cherchant à comprendre le mystère de ces réussites autant flamboyantes qu’exceptionnelles…au moins jusqu’à la chute.

Et, maintenant ? Les angles morts de la réglementation doivent être supprimés, en particulier dans ces hedge fund et autres family offices (entités créées par des familles fortunées pour gérer leur argent). Néanmoins, cela ne suffira pas sans une exigence accrue de transparence et des contre-pouvoirs efficients et responsables dans les entreprises. Il y a pour les régulateurs un enjeu important, ils doivent retrouver une crédibilité bien écornée. Il s’agit moins de rajouter de la réglementation à la réglementation que de la faire appliquer en la rendant efficace. Car au bout du bout, ce sont bien les clients qui sont les victimes de ces défaillances, or la régulation est avant tout là pour les protéger

Henri DEBRUYNE

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