La DDA trois ans plus tard

par | 13 Jan 2022 | Eclairage

Entrée en application le 1er octobre 2018, la Directive sur la distribution de l’assurance fera l’objet d’un réexamen en 2023. Bien que le recul soit encore insuffisant, il n’est pas inutile d’en mesurer les effets. C’est d’ailleurs l’exercice auquel s’est livrée l’EIOPA.

Six années de débats (2010 – 2016), plusieurs versions ont été nécessaires pour arrêter une directive censée renforcer et harmoniser la protection des consommateurs. Même si le recul est insuffisant, un premier inventaire des avancées et des carences est utile, ne serait-ce que pour utiliser l’année qui vient à préparer la révision qui devrait intervenir en 2023. En premier lieu, le constat, assez généralement partagé, s’accorde à reconnaitre que la cause des clients a progressé. Les représentants des consommateurs ne sont d’ailleurs pas les derniers à l’admettre. Les distributeurs et particulièrement les intermédiaires constatent que la « norme » établie par cette réglementation clarifie les pratiques et le qui doit faire quoi tout au long de la chaine de distribution.

Toutes les observations convergent pour souligner que les pratiques commerciales génèrent des affaires d’une meilleure qualité. Les opérateurs sont mieux formés, leur niveau de vigilance a progressé, le souci d’être conforme a progressivement trouvé sa place. Certes, il y a encore beaucoup de choses à faire et, ici ou là, prospèrent encore des pratiques condamnables exposant leurs auteurs à des sanctions qui sont de moins en moins anodines. D’ailleurs, le législateur impose une férule supplémentaire, comme dans la vente téléphonique, pour obtenir des corrections là où les acteurs n’ont pas voulu entendre la nécessité de réformer le modus operandi. La question perpétuelle est de faire en sorte d’améliorer la protection des consommateurs sans entraver le business outre mesure. Quoiqu’il en soit, le législateur penche toujours du côté du plus faible, le client. Ne pas intégrer cette dimension fait courir le risque de règlementations toujours plus contraignantes.

Des lacunes sont apparues dans la protection voulue par la DDA. Au premier rang, le contrôle des opérations pratiquées en Liberté de prestation de service (LPS) et en Liberté d’établissement (LE). L’expérience a montré que le contrôle de compagnies et/ou des distributeurs opérant sous ce mode était insuffisant ou carrément absent. Il faut corriger cela. D’autant que les instances européennes veulent à tout crin développer les activités transfrontalières qu’elles jugent trop modestes. Cela ne peut être envisagé que dans un cadre sécurisé. Ce qu’il n’est pas aujourd’hui.

Un autre sujet a pris de l’ampleur, celui de la digitalisation des activités. Déjà présente dans la directive, mais la pandémie a amplifié la nécessité de renforcer les capacités de l’offre digitale. C’est incontournable, mais ne doit pas se traduire par un affaiblissement de la protection des consommateurs. Il y a là un enjeu majeur, car les tenants de cette forme de distribution plaident pour un assouplissement à leur endroit pour favoriser leur développement. Ce qui constituerait une régression inacceptable tant à l’égard des clients que des concurrents.

Enfin, la question des rémunérations va se cristalliser. Elle est pendante dans les instances européennes comme dans la grande majorité des Etats-membres. C’est un sujet en soi. Aller vers plus de transparence est progressivement en voie de réalisation. Cela peut être une bonne chose à la condition expresse que les données de cette transparence soient objectives et c’est déjà en soi un défi. Adopter des mesures plus drastiques comme l’interdiction des commissions ne servira pas les clients et déstabilisera le service de conseil qui leur est dû. Les professionnels doivent se préparer à défendre des dispositions rationnelles et objectives. Les débats seront tendus

Henri DEBRUYNE

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