INDEXIA : l’heure des comptes a sonné

par | 23 Mai 2024 | Eclairage

C’est fait, le groupe INDEXIA est placé en liquidation judiciaire. Il laisse une situation de dettes conséquentes, plusieurs centaines de salariés au chômage et des milliers de victimes.

La décision est tombée. INDEXIA et 17 sociétés de ce groupe ont été placées en liquidation judiciaire ce 22 mai. Une décision attendue dont il faudra évaluer les conséquences financières et, bien sûr, humaines. Quoi qu’il en soit, les sommes en cause sont très importantes pour un courtier qui, par essence, ne porte pas le risque. Les liquidateurs vont évaluer les préjudices afin d’éclairer la situation réelle et expliquer de quoi est constituée la dette. Par ailleurs, Sadri Fegaier, le président, et sept filiales du groupe devront s’expliquer devant le tribunal correctionnel de Paris, en septembre prochain, pour pratiques commerciales trompeuses et obstruction à un contrôle. Les sanctions pourraient être salées. A l’audience, un témoin a rapporté le propos de la Procureure : Quand le business-plan d’une entreprise repose sur une escroquerie, ça ne peut pas fonctionner.

Pour autant, il faudra bien comprendre comment ce groupe en est arrivé là. Ni les potentielles fautes de gestion ni les décisions managériales inadaptées n’expliquent la lente dérive de ce groupe et la persistance de pratiques commerciales contestées. Certes, l’homme a du charisme et semble doté d’un sens des affaires réel, sinon d’un bel opportunisme, mais il génère des situations pas claires qui, au fil du temps, débouchent sur des interventions répétées de la DGCCRF1 puis de l’ACPR2. La première ne semble pas avoir conduit ce groupe à corriger ses pratiques et la seconde est intervenue bien tard en 2023. Car, dès juillet 2020 un collectif « arnaque Sfam » s’est créé sur Facebook. Très vite, il a atteint 1600 membres ! La presse nationale s’est largement faite l’écho des difficultés rencontrées par les clients de la Sfam puis d’INDEXIA. Elles étaient donc devenues notoires. Le landerneau professionnel en bruissait depuis des années.

Néanmoins, elles ont perduré. Ni les pouvoirs publics, ni les assureurs, leurs partenaires, ne se sont employés à faire cesser ces pratiques. La Fnac n’a pas non plus fait preuve d’une grande réactivité, elle n’a mis fin au partenariat qui la liait à la Sfam que tardivement. Quant aux assureurs porteurs de risques, certains plus avisés se sont retirés rapidement, d’autres ont regardé la situation se dégrader et se trouvent aujourd’hui dans une situation délicate. La publication de la masse des créances dira s’ils en ont et de quelle ampleur. Dans tous les cas, leur responsabilité est engagée. Ils seraient bien inspirés d’ouvrir un guichet pour dédommager rapidement leurs assurés afin d’éviter un préjudice d’image encore plus important.

Nul doute que l’ACPR sera amenée à regarder de près les manquements à la réglementation en matière de contrôle des distributeurs. Collectivement, nous devons nous demander quels dysfonctionnements, quelles insuffisances, quelles complaisances voire quelles complicités ont produit un tel résultat. Comment dans une activité aussi contrôlée, par la Puissance publique, la DGCCRF, l’ACPR voire la CNIL ont laissé prospérer un tel scandale. La réponse n’est surement pas dans plus de réglementation, mais dans le strict respect de l’actuelle qui, autant que nous puissions le savoir, semble bien suffisante pour éviter de telles dérives.

Cela n’est jamais agréable, mais un examen de conscience s’impose. Faute de quoi, nous attendrons le prochain scandale.
1 La Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes lui inflige une amende de 10 millions d’euros en 2018
2 L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution prononce une interdiction temporaire d’exercer une activité de distribution à l’égard de la Sfam

Henri DEBRUYNE

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