Assurance vie et intégration des PPB – Les assureurs ont gagné, les épargnants subissent et la transparence est perdante

par | 30 Jan 2020 | Humeur

Ainsi donc les PPB* viennent au secours des fonds propres des assureurs. In fine, les épargnants, auxquels personne n’a rien demandé, vont soutenir les ratios de solvabilité des assureurs vie.

L’effet d’affichage est réel. La situation globale de l’assurance-vie verra ses fonds propres gonfler alors qu’en réalité rien, absolument rien, n’aura changé. Par un artifice, les provisions pour participation aux bénéfices*(PPB) qui reviennent aux assurés intègrent pour partie les fonds propres. L’impact est significatif. Ces sommes sont évaluées à une cinquantaine de milliards d’€. L’ACPR pour 2019, autorise d’en affecter environ 70% (entre 35 et 40 milliards d’€) et donc de les intégrer en fonds propres Solvabilité II (ce chiffre n’est pas figé. Il est sujet à fluctuation selon les assureurs car dépendant notamment de la situation de chaque compagnie, de la finesse de ses calculs d’évaluation et de l’historique de dotation de la PPB).

Les spécialistes évaluent l’amélioration à 70 points de base soit 35 à 40% sur le ratio de solvabilité. En réalité rien ne change. Les assureurs bien dotés le restent, ceux qui flirtent avec l’insuffisance ne vont pas améliorer leur situation pour autant. Néanmoins, il y a deux grands perdants. L’épargnant n’est guère respecté. Qui a imaginé de lui demander son avis ? Dans un métier où la confiance est au cœur de la relation, c’est un mauvais coup !

L’autre grande perdante est la transparence. Une telle manœuvre peut s’apparenter à une opération de cosmétique. Résultat le ratio de solvabilité n’est plus le reflet de la solidité financière effective de l’assureur. Déjà complexe à interpréter, cette donnée essentielle devient nébuleuse et l’argument selon lequel nos voisins allemands font la même chose n’en est pas un. Il s’agit très clairement d’une régression de la qualité de l’information due aux épargnants et d’une complexité supplémentaire pour ceux qui les conseillent.

Gageons qu’une bataille sur la clarification va s’engager. Les informateurs du marché vont s’attacher à clarifier la situation réelle des assureurs-vie. Ces derniers, enfin les mieux lotis, pourront argumenter sur leur bonne santé financière et communiquer sur leur solidité. Indéniablement un avantage compétitif !

Henri DEBRUYNE

*PPB provision pour participation aux bénéfices est une réserve de participation aux bénéfices. Elle permet soit de lisser les rendements du contrat et d’offrir ainsi une rémunération stable, soit de pallier les résultats d’une année marquée à la baisse. Les assureurs ne sont pas obligés de distribuer immédiatement la participation aux bénéfices (PB) prévue par la législation, ils ont huit ans pour le faire. La partie non distribuée de la PB vient alimenter un compte de provision, appelé provision pour participation aux excédents. Cette réserve est la propriété des épargnants.

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